ANNEXE 2 : Interconnexions


Quelques éléments d'histoire de l'interconnexion des réseaux IP

du peering au transit, des lignes spécialisées à tous supports, tous débits.

Dates significatives dans l'histoire
d'Internet
(Source : table 2-1 de http://www.ncs.gov/n5_hp/Information_Assurance/PSN-A97.htm)

Dates marquantes de l'histoire d'Internet aux USA

Jusqu'à 1986 : La préhistoire, de ARPAnet à NSFnet

les débuts du peering

Jusqu'en 1986, les réseaux basés sur IP (essentiellement ARPAnet et aussi NASA, ESnet et MILnet) étaient financés par les agences gouvernementales des Etats-Unis et strictement réservés aux acteurs de la recherche financés par ces agences. Ces réseaux étaient laborieusement interconnectés selon un modèle technique non hiérarchique dépassé (EGP) et selon des règles de réciprocité élaborées par ces agences au sein du Federal Network Council(FNC).

Tout change à partir de 1986 avec la création de NSFnet, réseau pour la recherche et l'accès aux super-calculateurs de la NSF, d'abord à 56 kbit/s puis à 1,5 Mbit/s. ARPAnet, qui était initialement un outil de recherche puis avait été transformé en réseau opérationnel de la recherche sous la pression des utilisateurs et de leurs nouvelles applications (transfert de fichier, accès à distance, et surtout courrier électronique) disparaît ; NSFnet le remplace.

Le backbone NSFnet
(Source : table 2-4 de http://www.ncs.gov/n5_hp/html/int-2his.html)

Le backbone NSFnet à 1,5 Mbit/s en 1988

De 1986 à 1992 : Les débuts, Internet devient international et commercial

peering limité par les règles d'utilisations

La National Science Foundation (NSF, agence fédérale chargée de financer la recherche) finance directement l'ossature (le NSFnet backbone) entre les centres hébergeant les super-calculateurs et laisse aux initiatives régionales le soin de financer une quinzaine de réseaux régionaux desservant les centres de recherche et raccordés à l'ossature. Le coût total est évalué - en 1990 - à 100 millions de dollars dont 5 millions de dollars directement pour l'ossature.

NSFnet devient le point focal des réseaux aux Etats-Unis puis en Europe.

L'année 1988 est aussi marquée par l'apparition du service IP dans des réseaux ouverts au secteur privé, à l'enseignement supérieur ou hors des Etats-Unis tels que :

Les premières interconnexions IP sont tolérées par les agences et soutenues activement par la NSF qui les intègre dans son routage, les organismes bénéficiaires étant approuvés au cas par cas. L'interconnexion se fait sur la base de "réciprocité" (à coût nul, peering). Il aurait été techniquement et organisationnellement impensable qu'il en fût autrement.

Le mouvement s'amplifie aux Etats-Unis conformément à la politique de "commercialisation, privatisation and internationalisation" de la NSF énoncée au tout début des années 1990. UUnet acquiert le statut de "regional network". Au même moment, en Europe, les premiers acteurs (NORDUnet, EUnet, SWITCH, CERN et INRIA, rejoints par EASYnet et plus timidement par les réseaux R&D à financements publics) s'organisent en "club" pour traiter la coordination indispensable à IP (RIPE, Réseaux IP Européens, dont le bras opérationnel RIPE-NCC verra le jour en 1994). C'est au niveau de RIPE que se discutent et s'élaborent les premières interconnexions, les premiers partages d'infrastructure :

C'est aussi au niveau de RIPE qu'est abordée l'ouverture vers les pays d'Europe centrale et les relations avec NSFnet (et donc par extension avec les réseaux d'Amérique du Nord) et la création d'une ossature européenne pour les réseaux de la R&D (Ebone, en 1992, financé en partie par Bruxelles).

Les interconnexions restent à coût nul mais les "Acceptable Usage Policy" (AUP) imposent des restrictions censées préserver l'utilisation des fonds publics ou même la sécurité des Etats-Unis. Ces restrictions créent des problèmes insurmontables techniquement sauf à déployer de bout en bout une double infrastructure "publique" et "privée".

Le bénéfice de l'interconnexion (c'est à dire de l'accès aux Etats-Unis) est timidement étendu aux pays de l'ex-Europe de l'Est.

De 1992 à 1996 : L'Internet devient commercial aux Etats-Unis, NSFnet disparaît

Aux Etats-Unis, les réseaux IP commerciaux, dont plusieurs sont issus (privatisation) des réseaux régionaux de NSFnet (PSInet, NYSERnet), deviennent progressivement les acteurs principaux d'un Internet ouvert aux activités commerciales (commercialisation). Sous l'impulsion de UUnet, ils mettent en oeuvre - toujours sur la base de la réciprocité - une organisation d'interconnexion à but non lucratif : le Commercial Internet eXchange (CIX).

principaux GIX aux Etats-Unis en 1997
(source : table 3-1 de http://www.ncs.gov/n5_hp/Information_Assurance/PSN-A97.htm)

Les principaux GIX aux Etats-Unis en 1997

NSFnet prépare sa disparition (privatisation) en contribuant financièrement à la mise en oeuvre de quatre lieux d'interconnexion, les "Network Access Point" (NAP). Ces NAP doivent maintenir la connectivité entre les réseaux commerciaux et les réseaux de la communauté R&D toujours soumis aux AUP. Ils sont également ouverts aux fournisseurs de conduit (revendeurs de capacité IP des FAI nationaux, voir plus bas). L'organisation et l'exploitation des NAP sont confiées à des sociétés commerciales :

Enfin, la NSF finance le développement et le déploiement (par Merit) de route server simplifiant les échanges de route entre les acteurs à partir d'informations administratives préalablement collectées dans la Routing Arbiter Data Base (RADB). NSF finance aussi la constitution de cette base et ses outils d'entretien.

Les points d'interconnexion prennent les noms de Global Internet eXchange (GIX, surtout en Europe), Internet eXchange Point (IXP), Metropolitan eXchange Point (MXP) et Network Access Point (NAP, issus de NSFnet).

Les premiers GIX apparaissent en Europe (Londres, Stockholm, Paris).

Après 1996 : explosion du modèle coopératif aux Etats-Unis

l'interconnexion, un enjeu commercial, voire monopoliste

Le problème de l'équité de la réciprocité, qui se pose avec plus d'acuité aux Etats-Unis qu'en Europe, est à l'origine de solutions plus ou moins draconiennes qu'on a pu éviter ou qui n'ont pas encore cours en Europe. L'interconnexion devient au mieux un enjeu commercial, au pire une opportunité pour des pratiques anti-concurrentielles.

Aux Etats-Unis :

En Europe :

A partir de 1996, les nouveaux supports modifient profondément le métier de FAI

et accentuent le retard entre les Etats-Unis et l'Europe

A partir de 1996, aux Etats-Unis, les opérateurs historiques ou émergents - dont le champ d'activité (local ou longue distance) est précisément délimité par la FCC, interviennent massivement dans l'Internet :

Les regroupements augmentent ou complètent l'infrastructure des FAI :

Le métier du FAI, jusqu'ici principalement concerné par le routage sur des lignes spécialisées à débits moyens et la concentration d'accès par le réseau téléphonique, en est profondément affecté :

En Europe, la complexification évoquée précédemment n'a pas encore touché les FAI.

Références citées

Les GIX aux Etats-Unis
http://www.ncs.gov/n5_hp/html/int-3def.html
http://www.ncs.gov/n5_hp/n5_ia_hp/GovPub.html
GIX en Europe
http://www.isi.edu/div7/naps/naps_eu.html
http://www.nic.fr/Guides/gix.html
LINX, le GIX de Londres
http://www.linx.net
D-GIX, le GIX de Stockholm
http://www.netnod.se/index-eng.html
Glossaire des termes de l'Internet, de l'interconnexion et des télécommunications
http://cookreport.com/cook/glossary.html
Rapport OCDE : Internet Traffic Exchange, Developments and Policy
http://www.oecd.org/dsti/sti/it/cm/prod/traffic.pdf
Rapport OCDE : Internet Infrastructure Indicators
http://www.oecd.org/dsti/sti/it/cm/prod/tisp98-7e.pdf

Mise à jour : juin 1999